05/02/2010

Quand s'approche le Saint... (5ème dimanche du Temps)

Lorsque le Saint s’approche, c’est l’effroi : Eloigne-toi de moi car je suis un homme pécheur !

Lorsque le Saint s’approche, nous ne sommes pas prêts. Ce n’était pas prévu ! Est-ce que le saint habite chez les hommes ? Que fait-il ici ? Ne devrait-il pas être au ciel ? Faut-il s’étonner que le monde aille si mal si le Saint n’est pas où il dit être.

Lorsque le Saint s’approche, c’est la panique, et il vaut mieux qu’il s’en retourne : Eloigne-toi de moi ! Et c’est déjà ce que disaient les versets lus la semaine dernière : il faut trouver le premier escarpement pour y précipiter Jésus et s’en débarrasser.

Quand le saint s’approche, comment le reconnaître ?

C’est la profusion. On n’a jamais vu cela. Bien sûr, le texte en rajoute. On passe du néant, des filets vides, au trop. Mais comment dire l’excès ? Comment dire un excès qui n’est pas simplement le plus, mais autre chose ; non ce qui comble, mais ce qui déborde, comme une source, non ce qui remplit, mais ce qui se répand généreusement ?

Certains médiévaux parlent, en face du néant par défaut d’une nuit passée à ne rien prendre, d’un néant par excès, une surabondance qui n’est rien de ce dont on pourrait avoir, posséder, de ce dont on pourrait avoir idée, penser.

Et quand le Saint s’approche, aujourd’hui, que se passe-t-il ?

D’abord, il ne se passe rien, plus rien. Même ceux qui ne croient pas en Dieu se sont habitués à cette idée que Dieu habitait chez les hommes. Tous savent cela, même s’ils n’y croient pas. Nous avons apprivoisé le religieux.

Chez les Grecs anciens, on n’était pas étonné que les dieux puissent se balader chez les hommes. Il faut même se méfier, car ils se déguisent et l’on ne sait jamais qui l’on croise. La foi judéo-chrétienne pourrait ressembler à cela, mais si la méfiance et l’effroi demeure de rencontrer Dieu, ce n’est pas parce qu’il pourrait nous jouer un mauvais tour. C’est que nous pourrions ne pas le reconnaître, ne pas l’accueillir comme il se doit.

Abraham a Mambré a bien joué. Et aussi celui qui visite le prisonnier, habille celui qui est nu, nourrit l’affamé. Dieu est là, qu’on le sache ou pas.

Servir le frère, voilà qui est devenu la religion commune. Non que nous soyons des saints en la matière, croyant comme non-croyant. Mais enfin, nous savons que c’est cela l’idéal de vie, le service du frère. Les valeurs du christianisme demeurent celles de notre civilisation : partage, amour, pardon.

Mais plus besoin d’être chrétien. On connaît même tous des non-croyants qui sont plus généreux, altruistes, dit-on, que les chrétiens. Alors à quoi bon être encore chrétiens ?

Quand le saint s’approche aujourd’hui, que se passe-t-il ?

Faudra-t-il que nous attendions les filets pleins et les miracles pour croire ? Faudra-t-il faire croire que les filets peuvent être pleins comme les évangélistes et autres burn again pour que l’on voie ? Cela ne marcherait qu’à une condition peut-être, que l’on aie peiné toute une nuit sans rien prendre. Pour que l’excès se manifeste il faut que le manque soit misère ! Et qui est prêt à tout perdre pour tout gagner ?

Alors plutôt que d’attendre le miracle, le merveilleux et de s’étonner qu’aujourd’hui il n’y a plus de pêches miraculeuses si jamais il y en eut, si jamais il peut y en avoir, il faut apprendre à ne pas voir et désapprendre l’habitude du Saint si proche.

Quand le Saint s’approche, serons-nous étonnés, émerveillés peut-être, mais d’abord surpris. Seigneur tu es là ? Et moi qui pensais que ce serait demain. Ou bien, et moi qui pensais que tu ne viendrais jamais. Comment vivre ici en sa présence ? Il est au milieu de nous pour que nous menions des vies sanctifiées, non pas forcément parfaites, mais habitées par le Saint.

Quand le Saint s’approche, pour peu que comme Abraham, nous l’accueillons, même sans le reconnaître, et nous voilà rendus à une vie plus grande, plus belle, sainte. Quand le saint s’approche, c’est le ciel sur la terre, non la facilité, la magie qui supprime tous les problèmes, mais la joie intime des époux qui savent le conjoint présent, même absent. Il nous porte en son cœur, en son amour.

Quand le Saint approche, cela ne change rien, et point n’est besoin de le recevoir pour vivre bien. Mais que nous serions bêtes à refuser un tel voisinage, une telle alliance, les noces éternelles.

Et l’excès se répand encore, qui ne change rien, mais fait vivre comme la joie et la paix. Bien sûr, on peut vivre sans ami, sans joie. Mais est-ce cela vivre ? Et si Dieu était de ceux qui nous aiment, celui qui décuple la joie, comme en une pêche miraculeuse. Encore, que cette joie ne soit rien de nos joies, néant par excès, mais la prodigalité, la largesse, la générosité, la grâce de celui qui s’offre de nous faire vivre de sa propre vie.


Texte du 5ème dimanche du temps C : Is 6, 1-8 ; 1 Co 15, 1-11 ; Lc 5, 11-11


- Seigneur, nous te prions pour ceux qui n’ont rien, épuisés par le travail de la nuit ou le chômage, des jours durant, des années durant. Fais-toi connaître comme le Saint.

Tu es Saint Notre Dieu, toi seul est Saint.

- Seigneur, nous te prions pour ton Eglise. Saura-t-elle reconnaître que ses filets sont vides, que sa pêche est vaine, afin de compter seulement sur ta présence. C’est de ta sainteté qu’elle est sainte.

- Seigneur, nous te prions pour ceux qui nous entourent et qui n’ont pas besoin de toi pour vivre, vivre bien et heureux. Fais-toi connaître comme le Saint débordant de générosité.

- Seigneur, nous te prions pour ceux d’entre nous, les jeunes notamment, qui ne voient vraiment pas pourquoi ils se fieraient à toi, puisque l’on n’a pas besoin de toi pour vivre. Tu n’es rien de ce dont nous avons besoin mais tu es celui qui plus que tout nous aimes. Fais-toi connaître comme l’amant et l’ami.

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